Un dirigeant d'une chaîne du câble, spécialisée dans la pornographie, est à la recherche de nouveaux programmes. Un de ses employés parvient à capter une étrange émission appelée Vidéodrome. Des personnes y sont torturées et tuées avec beaucoup de réalisme...
Le réalisateur canadien David Cronenberg (La mouche (1986), eXistenZ (1999)...) venait de réaliser un petit succès avec Scanners (1981). Il parvint ensuite à rassembler un plus gros budget pour un film plus ambitieux: Vidéodrome. On y trouve James Wood (Vampires (1997) de John Carpenter...) qui allait devenir une grande vedette grâce à Il était une fois en Amérique (1985) de Sergio Leone. On note aussi la présence de Debbie Harris, chanteuse du groupe Blondie, très populaire au début des années 1980.
Vidéodrome suit Max Renn, responsable d'une chaîne du câble diffusant des programmes violents ou pornographiques. Pour lui, il s'agit avant tout de faire du business et il se soucie assez peu des problèmes de philosophie ou de responsabilité. En cherchant des nouveautés, il tombe sur un étrange programme émis par satellite : Vidéodrome. Cette émission diffuse des meurtres et des tortures ritualisés dans un décor abstrait. Fasciné, mais convaincu qu'il ne s'agit que de reconstitutions très réalistes, il va enquêter sur cette émission mystérieuse. Mais il commence à être victime d'hallucinations. C'est là la première intrigue qui est proposée au spectateur. On pourrait croire qu'il ne s'agit donc que d'un quelconque thriller basé sur une histoire de snuff movie (comme Hardcore (1979) de Paul Shrader ou 8 mm (1999) de Joel Schumacher).
Mais le film glisse lentement vers une science-fiction rehaussée d'une réflexion politique. En effet Vidéodrome n'est pas un programme télévisé : il s'agit en fait d'une onde qui peut être transmise à partir de n'importe quel signal vidéo diffusé sur une télévision (câble, cassette...). Cette onde permet de faire muter le cerveau des personnes exposées. On peut alors leur envoyer à volonté des ordres et en faire des soldats obéissants. Max Renn devient un de ses hommes sans volonté, enjeu d'un conflit entre deux puissantes sociétés secrètes: la Nouvelle Chair, qui veut libérer les hommes de l'influence des machines d'une part ; Vidéodrome, financée par de puissants groupes industriels et prônant des valeurs d'extrême-droite d'autre part. Une guerre secrète (qui n'est pas sans rappeler Scanners) se déclenche pour la détention des chaînes de télévision et des moyens d'information. Elle me semble une inspi tout à fait intéressante pour Delta Green.
Au-delà du remarquable scénario, on retrouve aussi le style très maîtrisé et remarquablement efficace de Cronenberg. Mécanique et organique se mélangent avec délectation (la télévision, Max Renn se transformant en magnétoscope...). Certaines hallucinations sont des moments très gore et très graphiques, dans lesquels les corps humains sont soumis à des torsions et à des pressions incroyables, un peu comme les têtes de Scanners. Ces visions permettent de construire le récit selon une structure très originale. Plus le film avance, plus il est difficile de savoir quand Max Renn est soumis à des hallucinations, ou quand celles-ci sont le produit de son cerveau ou de Vidéodrome. La fin est à ce titre particulièrement énigmatique.
Doté d'une réalisation rigoureuse, parfaitement interprété, Vidéodrome impressionne encore aujourd'hui par la qualité et l'originalité de son récit. Il aura une influence déterminante sur la littérature et le cinéma de science-fiction qui le suivra. C'est certainement une des œuvres les plus réussies de Cronenberg.